Tu riras moins quand tu connaîtras les hommes [Florent Bottero]

L'auteur : Florent Bottero a reçu le prix Matmut du premier roman 2017 pour Tu riras moins quand tu connaîtras les hommes. Après quelques brèves incursions à l’université, dans la manutention, dans la Fonction Publique, en Australie même, il se consacre désormais à l’écriture à plein-temps et vit dans le Var.

L'histoire : Tarn, automne 1856. Un corps de jeune fille flotte dans une rivière. Tout accuse son père, le redouté Joseph Roubaud, en cavale depuis la macabre découverte, et les villageois organisent une gigantesque battue pour le retrouver. Dans sa fuite, Roubaud fait la rencontre de la Forge, mystérieux colosse au calme olympien. Rejetant sur les gens du village la responsabilité de la mort de son enfant, Roubaud n'a dès lors qu'une obsession : se venger. Scellant un pacte avec son nouvel et puissant allié, il se lance dans une expédition sanguinaire. Bientôt, ce couple bancal et maudit, furieux et génial, va écrire sa légende, révéler les mensonges des uns et les turpitudes des autres. Car dans ce conte apocalyptique, cruel et hypnotique, chacun joue avec les vérités, les discours sont des armes, les mots tuent, les idées massacrent.

Mon avis : J’ai trouvé que le roman démarrait plutôt bien : une jeune fille retrouvée morte, un père qui s’enfuit et qu’on accuse un peu trop facilement. Mais il s’arrête rapidement pour tourner en rond : les personnages sont tous pris dans leurs délires et on en oublie totalement la jeune Ophélie. Entre fait divers et conte philosophique l’auteur semble hésiter, et brouille les pistes au risque de rendre l’ensemble parfois incompréhensible. L’écriture ancre trop le récit dans le réel. Et puis, le cadre historique n’est pas particulièrement exploité. Roubaud parti de Vendée pour s’installer dans le Tarn, ça aurait pu se passer presque n’importe où ailleurs. De même, le contexte de l’industrialisation et de l’apparition des machines n’est pas vraiment creusé. Soit, cette fin de XVIIIe fut le théâtre de moult révoltes mais il aurait fallu en faire plus qu’un prétexte.

J’ai suivi sans réelle passion le déchaînement qui prenait ce village. On redécouvre la violence qui anime l’homme. Après la découverte du crime atroce, le petit village de Lavernes sombre dans la folie furieuse. C’est un déchainement de violence dans lequel les habitants vont choisir leur camp, et au passage révéler leur vraie nature. Les squelettes vont sortir des placards. Cette violence prend toutes les générations, les vieux qui veulent montrer leur pouvoir comme les jeunes, avides d’être enfin aux commandes à leur tour, de prouver ce dont ils sont capables. Le salut semble alors ne pouvoir venir que des femmes, qui elles ne s’abiment pas dans la vengeance, malgré toutes les horreurs qu’elles peuvent subir : trahison, viol, rejet. Elles seules sont la lumière dans cette noirceur.

L’auteur s’intéresse et creuse la psychologie de Roubaud et de son image inversée La Forge, mais ne semble pas s’intéresser plus que cela aux autres protagonistes qu’il met sur leur route, les abandonnant sur le bord du chemin. Le lecteur papillonne d’un personnage à l’autre, leur découvre des liens insoupçonnés et qui en deviendraient miraculeux à force de tous les relier les uns aux autres. Une façon de dire que nous nous ressemblons tous ?

Je n’aimerais pas être trop négative dans mon billet car il y a de l’idée ici et du travail. Mais je n’ai pas vraiment été convaincue.

Tu riras moins quand tu connaîtras les hommes, de Florent Bottero
Éditions Denoël
Août 2017

Commentaires

Alex Mot-à-Mots a dit…
On sent en effet que tu n'as pas du tout accroché.
La chèvre grise a dit…
@ Alex Mot-à-mots : oui, mais c'est toujours embêtant quand on n'accroche pas alors qu'il y a des qualités à souligner tout de même.

Posts les plus consultés de ce blog

La cité Abraxas

MAM Paris #10 : Le peignoir jaune de Tal-Coat

Musée du Quai Branly #4 : Amériques