Le camp des autres [Thomas Vinau]

L'auteur : Né en 1978 à Toulouse, Thomas Vinau est un poète et écrivain français. Le camp des autres est son quatrième roman.

L'histoire : Gaspard et son chien s'enfuient dans la forêt. L'enfant a peur, il a froid, il court, il trébuche, il se cache. Il est blessé. Un homme le recueille. Qui est ce Jean-le-blanc ? Un sorcier, un contrebandier, un professeur ? Avec lui, et d'autres récalcitrants - ceux de la Caravane à Pépère qui défraya la chronique au début du XXe siècle - Gaspard va découvrir la vie en marchant sur le monde.

Mon avis :Au début, le sujet est un peu crispant comme le dit Leiloona. Gaspard a été battu et il fuit, son chien à ses côtés, guère en meilleur état. Le discours indirect libre laisse affleurer les émotions sans les dire vraiment. Mais au fil des chapitres, la poésie de Thomas Vinau enchante et emporte. Elle nous fait ressentir l’essence même des choses et des êtres. Les chapitres ne faisant pas plus d’une page, le style apporte le dynamisme nécessaire pour faire avancer la situation. Et je me suis retrouvée complètement happée dans ce roman, flottant au gré des mots choisis avec soin par l’auteur. J’ai suivi comme en apnée le petit reprendre du poil de la bête auprès d’un marginal qui va changer sa vie et lui faire concevoir le monde différemment.

Loin d’être sombre, ce récit est baigné par la plume lumineuse de l’auteur, tout en poésie et en respirations, certes nécessaires, pour décrire la moindre situation. Les personnages, tous échoués et perdus à leur manière, cherchent en s’alliant à survivre mieux, comme ils le peuvent, de rapine peut être mais avec honneur et sans violence. Ces êtres écorchés trouvent refuge au cœur de la forêt, univers si bien décrit, vivant, primitif. Ils forment le camp des autres, celui qui dérange les braves gens et bons bourgeois qui dorment bien au chaud chez eux. Auprès d’eux, Gaspard s’ouvre au monde.

Derrière ce récit historique de la Caravane à pépère, qui m’était inconnue, c’est un autre plus actuel que Thomas Vinau nous offre : celui des solidarités qui font défaut dans notre société. Oubliés et marginaux, insoumis et non-conformistes en tout genre se mélangent quelles que soient les époques. Sans jugement, l'auteur nous met devant notre propre intolérance, dénonce les souffrances de ce monde, que nous restons à contempler, préoccupés que nous sommes dans notre quotidien.

Un bel hommage à toute cette « indigence unifiée qui se rebiffe » et dont la forêt est le refuge ultime. Et un auteur que j’ai découvert avec bonheur grâce au #MRL17de Price Minister.

"Le noir tombe comme une couverture trop grande et à mesure que la lumière se tamise on entend toute une nouvelle musique qui monte entre les branches. Des bruits qui n'étaient pas là avant ou que personne n'écoutait. Les clochettes glacées de l'eau un peu plus loin. Les arbres qui font craquer leurs vertèbres. Le froissement des ailes et des feuilles mêlées. La terre qui se recroqueville en croustillant. Des fouissements dans les buissons. Le frottement des langues, râpeuses et chaudes de tous les mammifères qui nettoient leurs blessures." (p°29)

Le camp des autres, de Thomas Vinau
Alma Éditeur
Avril 2017

Commentaires

Alex Mot-à-Mots a dit…
Il me tarde de le lire.
La chèvre grise a dit…
@ Alex Mot-à-mots : il rencontre un franc succès. Je n'ai lu que très peu d'avis mitigé.
Faurelix a dit…
IL me fait très envie d'autant plus que j'adore cette maison d'éditions !

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