L'anomalie [Hervé Le Tellier]

L'auteur
: Journaliste et écrivain français né en avril 1957, à la fois de nouvelles, de pièces de théâtre, de poésie et de romans, Hervé Le Tellier est également membre de l'Oulipo. L'anomalie a obtenu le Prix Goncourt 2020.

L'histoire : "Il est une chose admirable qui surpasse toujours la connaissance, l'intelligence, et même le génie, c'est l'incompréhension."
En juin 2021, un événement insensé bouleverse les vies de centaines d'hommes et de femmes, tous passagers d'un vol Paris-New York. Parmi eux : Blake, père de famille respectable et néanmoins tueur à gages ; Slimboy, pop star nigériane, las de vivre dans le mensonge ; Joanna, redoutable avocate rattrapée par ses failles ; ou encore Victor Miesel, écrivain confidentiel soudain devenu culte.
Tous croyaient avoir une vie secrète. Nul n'imaginait à quel point c'était vrai.

Mon avis : Ce roman emprunte à beaucoup de genres et de ce fait n’entre dans aucune case. C’est surement sa qualité principale. À la fois comédie humaine, roman de science-fiction ou policier, L’anomalie met le lecteur face à un événement étrange qui questionne toute la construction de notre monde et des sociétés qui le régissent. Comment réagir et surtout, comme expliquer l’inexplicable ? Car l’Homme est ainsi fait qu’il a besoin de comprendre, de rationnaliser. Alors quand la vie de la galerie de personnages est bouleversée par cet événement, le réflexe est de suivre le protocole fixé pour de tel cas. Qu’importe s’il a été rédigé dans des conditions farfelues ! De grands scientifiques sont donc rassemblés pour formuler les hypothèses les plus ambitieuses. 

Moi qui craignais de me perdre dans de trop nombreux personnages, le découpage en chapitres assez courts et un style très clair permettent d’entrer dans le roman avec facilité et de ne lâcher aucun fil. On se demande quand ces fils vont se regrouper et ensuite comment ils vont diverger. Des pointes d’humour ne masquent pas mais  plutôt soulignent le sérieux de la question métaphysique « je pense donc je suis » qui court sur toute la deuxième partie du roman. Le trait est peut-être un poil trop exagéré par moment, ce qui fait que le récit est toujours sur le fil de tomber dans le caricatural. Heureusement, Hervé Le Tellier réussit à éviter cet écueil, notamment en jouant sur plusieurs niveaux, du plus fin, l’intimité des personnages qu’ils décident de suivre, au plus général, la gestion d’un incident aux retombées internationales. 

Après lecture, et avoir passé un très bon moment, j’avoue pourtant ne pas comprendre ce qui a motivé l’attribution du Goncourt à ce roman, même s’il a de belles qualités. Il est bourré de clins d’œil et de références, tout en restant parfaitement accessible. Il lui manque juste un peu de profondeur à mon goût. J’avoue m’attendre, de la part d’un Goncourt, à un peu plus d’ambition, même si ce titre est tout à fait original.


L'anomalie, d'Hervé Le Tellier
Éditions Gallimard
Novembre 2020

Commentaires

keisha a dit…
D'accord, mais un goncourt de ce genre, à savoir assez ludique, on aime!
Alex Mot-à-Mots a dit…
En tout cas, un Goncourt qui a eu du succès, et c'est tant mieux.
La chèvre grise a dit…
@ keisha : j'aime aussi, pas de doute là dessus. Je ne peux pas faire de grosses comparaisons, je ne lis pas systématiquement les Goncourt, sauf s'ils me tentent au delà du prix. Mais un "Au revoir là-haut" me semblait plus ambitieux. Ceci dit, ça ne retire rien au mérite de ce roman, on est bien d'accord.

@ Alex Mot-à-mots : tout ce qui encourage à lire est bon à prendre :)

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