Les envolés [Etienne Kern]

L'auteur
: Né en novembre 1983, Etienne Kern est professeur de lettres en classe préparatoire. Les envolés est son premier roman.

L'histoire : 4 février 1912. Le jour se lève à peine. Entourés d'une petite foule de badauds, deux reporters commencent à filmer. Là-haut, au premier étage de la tour Eiffel, un homme pose le pied sur la rambarde. Il veut essayer son invention, un parachute. On l'a prévenu : il n'a aucune chance. Acte d'amour ? Geste fou, désespéré ? Il a un rêve et nul ne pourra l'arrêter. Sa mort est l'une des premières qu'ait saisies une caméra.

Mon avis : Nous sommes en 1900 et Franz Reichelt, tailleur pour dames, s’installe à Paris. D’origine autrichienne donc presque Allemand, à une époque post-1870 où l’on n’aime pas trop les gens venus d’outre-Rhin. Un ami, Antonio Fernandez, lui ouvre les portes de son atelier avant qu’il puisse se mettre à son compte. Dix ans plus tard, les Français se passionnent pour l’aviation naissance. Les aéroplanes sont partout et les accidents sont nombreux. Un concours est donc lancé : on offre 5 000 francs à celui qui inventera un parachute. C’est le début d’un rêve fou, d’une obsession. Pour rendre hommage à un ami, pour consoler une femme, pour se trouver un but, pour être reconnu Oui mais, quand on n’a aucune compétence en ingénierie, cela s’avère compliqué voire suicidaire. Au point que, pour la première fois, la presse étant conviée à la démonstration, la mort sera filmée en direct. Franz Reichelt avait 33 ans.


Etienne Kern romance le récit de la vie de Franz Reichelt. Il le révèle solitaire et réservé, la moustache fière, Icare des temps modernes. Il construit aussi un écho tout personnel à cette tragédie qui confine au grotesque, celui du grand-père et d’une amie disparus, tous dans des chutes et pour lesquels il ranime des souvenirs douloureux jusqu'à décider de choisir ce dont il veut se remémorer. Il rend ainsi toute son humanité à Reichelt.

Un très beau premier roman, sobre et très touchant, shortlisté dans de nombreux prix.

"À un moment, j'ai cessé de chercher. Au fond, j'aimais mieux l'idée de ne pas être sûr. Les absents sont partout." (p°131)

Les envolés, d'Étienne Kern
Éditions Gallimard
Juin 2021

Commentaires

Alex Mot-à-Mots a dit…
Un homme malheureusement bien vite oublié.
La chèvre grise a dit…
@Alex Mot-à-mots : mais on peut compter sur des auteurs comme Etienne Kern pour les sortir des limbes et ce sont souvent de belles découvertes.

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