Fume et tue [Antoine Laurain]

L'auteur : Scénariste, réalisateur, assistant d'antiquaire, collectionneur, Antoine Laurain, né dans les années 1970, a exercé tous ces métiers avant de se tourner vers l'écriture. Fume et tue est son 2e roman, après Ailleurs si j'y suis paru en 2007 et qui a reçu le Prix Drouot.

L'histoire : Au panthéon des fumeurs cultes, vous avez connu Serge Gainsbourg, Winston Churchill, Humphrey Bogart, Georges Simenon... Jamais vous n'oublierez Fabrice Valantine.
Chasseur de têtes, accro à ses deux paquets de blondes quotidiens, Fabrice Valantine se rend un beau jour chez un hypnotiseur dont on lui a vanté les résultats miraculeux : à la surprise de tous, il a décidé d'arrêter de fumer.
La séance paraît tout d'abord réussir. Pourtant, quelques semaines plus tard, il craque, en allume une, et constate, stupéfait, que si l'envie de fumer demeure, le plaisir, lui, a totalement disparu.
Fabrice va bientôt découvrir que ses voluptueuses sensations ne lui reviennent... qu'après avoir commis un meurtre.
Drôle, inquiétant, provocateur, Fume et tue raconte la vie tabagique et l'oeuvre criminelle d'un homme qui aurait bien voulu qu'on le laisse fumer ses cigarettes tranquillement.

Mon avis : Cet auteur, je le découvre grâce à Brize qui a fait de ce roman un livre voyageur et bien sur grâce à Caro[line] qui nous en parle si souvent.
Fume et tue
est un roman bourré d'humour noir, cela peut se deviner rien qu'au titre qui reprend les avertissements que l'on peut trouver sur les paquets de cigarettes. Il se lit facilement de par son écriture légère et agréable, à la limite du polar : le lecteur sait dès le début qu'il va y avoir meurtre, à quatre reprises, mais il ne sait ni comment ni pourquoi.
Par flash-backs, suite à des séances d'hypnose pour essayer d'arrêter la cigarette, on découvre notre anti-héros. Par bien des points, le personnage de Valantine m'a fait penser à celui de Patrick Bateman dans American Psycho : sa façon de voir le monde, de ressentir les lois de la bienséance et ce monde où règne l'hygiénisme, comme un carcan qui l'emprisonne et dont il ne peut sortir qu'en tuant. Une dictature de la bienséance qui tue l'humanité à petit feu. Mais là où Bateman ira jusqu'à la mort, Valantine lui retrouvera paradoxalement sa liberté lorsqu'il sera incarcéré. Et puis, Bateman est un personnage tordu dès le début du roman de Bret Easton Ellis, alors que Valantine semble poussé à la folie par sa séance d'hypnose. En effet, au début du roman, il est plutôt un bourgeois bien établi, poseur, et qui prend la vie comme elle vient. Le meurtre n'est pas le sujet du roman, le premier n'apparaissant que bien après la moitié du livre. On est bien dans la dénonciation de ce qui normalise la société (incarnée par le personnage qu'il croise par deux fois au café).
La finesse de l'écriture d'Antoine Laurain est visible dans cet attachement qu'il nous fait ressentir pour son anti-héros, usant pour ce faire de différents procédés stylistiques : la première personne comme narrateur, le dessin des gentils et des méchants qui se fait par l'opposition fumeurs / non-fumeurs (les personnages sont toujours caractérisés par la marque de leurs cigarettes), des références diverses et variées à la dictature comme Hitler, la guerre froide... Tout ceci attache le lecteur à ce héros bizarre et lui permet de suivre, sans s'ennuyer, bien au contraire, l'histoire qu'il nous conte.

Un livre original et bien agréable.

Un grand merci à Brize pour ce livre voyageur qui part maintenant chez Bladelor.

blog : http://antoinelaurain.blogspot.com/

Commentaires

keisha a dit…
Eh bien il voyage vite, ce roman!
Marie a dit…
Je l'avais noté sur ma liste après avoir lu la présentation d'Ys. Décidément, ton billet et celui de Keisha me donnent vraiment envie de lire rapidement ce polar !
Anonyme a dit…
"American Psycho" est un livre atroce : j'ai dû sauter des passages absolument insupportables...
La chèvre grise a dit…
@Keisha : Oui, il se lit assez vite.

@Marie : ce n'est pas un polar à proprement parlé. Dès le début le narrateur te dit combien de personnes il va tuer et à peu près pourquoi il les tue. Reste juste à savoir qui.

@Ys : Oui, assez atroce. Cette dimension n'est pas dans Fume et tue. Mais j'ai trouvé une certaine ressemblance entre les deux personnages.
Brize a dit…
Ravie qu'il t'ait plu !
Et Keisha a raison : ce livre voyageur a pris une bonne vitesse de croisière, ce qui est très sympa pour les prochains sur la liste :) !
La chèvre grise a dit…
Faut dire qu'il est arrivé pile au moment où je finissais son prédécesseur. J'ai donc pu l'entamer tout de suite. Et une fois commencé, il se lit bien :-)
Merci pour cette lecture en tout cas.
Caro[line] a dit…
Je suis très contente que ce roman t'ait plu et qu'il poursuive sa route chez Bladelor !!
Alex-Mot-a-MOts a dit…
Trop de livres en attente en ce moment, je passe celui-ci malgré son humour noir, peut-être plus tard.
Manu a dit…
Un livre qui me tente de plus en plus, malgré que tu le rapproche du héros de American Psycho. Un de mes pires cauchemars !
La chèvre grise a dit…
@ Manu : Je ne fais se rapprochement que dans la façon de narrer les événements. Mais le personnage de Valantine reste tout de même beaucoup plus sympathique que Bateman et ne commet pas du tout les mêmes horreurs je te rassure !
Quant à American Psycho, personnellement j'avais été choquée mais j'avais bien aimé. Je trouvais ça différent et marquant. Bon, pas non plus une lecture à répéter trop souvent ;-)

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