La liste de mes envies [Grégoire Delacourt]

L'auteur : Grégoire Delacourt, né en 1960 à Valenciennes, est un publicitaire et écrivain français.

L'histoire : Jocelyne, dite Jo, rêvait d’être styliste à Paris. Elle est mercière à Arras. Elle aime les jolies silhouettes mais n’a pas tout à fait la taille mannequin. Elle aime les livres et écrit un blog de dentellières. Sa mère lui manque et toutes les six minutes son père, malade, oublie sa vie. Elle attendait le prince charmant et c’est Jocelyn, dit Jo, qui s’est présenté. Ils ont eu deux enfants, perdu un ange, et ce deuil a déréglé les choses entre eux. Jo (le mari) est devenu cruel et Jo (l’épouse) a courbé l’échine. Elle est restée. Son amour et sa patience ont eu raison de la méchanceté. Jusqu’au jour où, grâce aux voisines, les jolies jumelles de Coiff’Esthétique, 18.547.301€ lui tombent dessus. Ce jour-là, elle gagne beaucoup. Peut-être.

Mon avis : Parfois, je fais de bêtes blocages sur certains romans. A force d’en entendre parler partout, à force de lire en diagonale des avis hyper-enthousiastes, je n’ai même pas envie de me pencher sur le sujet. Je me braque et je reste camper sur une position idiote de principe : ce livre ne m’intéresse pas. Parfois aussi, des mois ou des années après, le livre me tombe dans les mains. On en parle moins autour de moi, je regarde le sujet, voire je ne lis même pas la quatrième de couverture et je tente, simplement. J’ai l’impression qu’ainsi, je donne toute sa chance au roman. Je lui laisse une chance d’exister et de m’emporter. Ce qui me conforte dans l'idée qu'une lecture réussie est souvent une question de timing, une rencontre au bon moment entre un livre et un lecteur. C’est ce qui s’est donc passé avec La liste de mes envies.

Ce roman est tout en délicatesse, en sentiment non-dit mais si bien montré dans les gestes quotidiens. Il nous permet de nous poser les bonnes questions : qu’est ce qui est important dans la vie ? A quoi peut-on juger de son bonheur ?

Que faire avec 18 millions d’euros ! Jocelyne se la pose, cette question lorsqu’elle apprend qu’elle est la gagnante d’un jeu auquel elle a joué totalement par hasard. C’est un coup à tout perdre, tout ce qui fait l’importance de sa vie actuelle. Bien sûr, elle peut améliorer beaucoup de choses en gagnant une telle somme : maison, voiture, une maison secondaire avec piscine, des voyages,… le tout selon ses goûts. Certains laisseraient tomber leur boulot. Mais au final, elle prend conscience que l’important se trouve dans les relations qu’elle entretient avec son mari, ses enfants, ses amis, tous ceux qui l’entoure. Si l’argent n’achète pas le bonheur mais améliorer le quotidien, il peut également détruire ces relations. Jocelyne va tergiverser, réfléchir, faire des listes de ce dont elle a besoin, ce dont elle a envie, ce qui serait extravagant mais amusant… On sent qu’elle n’a pas très envie de tout chambouler dans sa vie. Mais un événement va l’obliger à tout reconsidérer. Il m’arrive parfois, moi aussi, de jouer à l’Euro millions. Mais c’est avant tout une part de rêve que j’achète, bien plus qu’une envie de gagner. Alors je comprends les questions de Jocelyne. Rêver, c’est être vivant. Avoir des envies, des désirs secrets, dont on cherche petit à petit à se rapprocher, parfois, souvent même, pour ne jamais les atteindre. Car le plus intéressant, au-delà de la possession, c’est le chemin parcouru pour y arriver. C’est ce chemin qui nous construit, nous façonne, fait de nous ce que nous sommes.

L’auteur est ici très habile me semble-t-il. Il construit un récit suffisamment court pour ne pas noyer son lecteur dans un flot de sentimentalisme. L’événement bouleversant arrive assez tard, laissant à la question du bonheur prendre la place centrale. Oui, les personnages peuvent paraître parfois un peu caricaturaux, oui la situation et le style sont simplistes, mais cela colle tellement bien à l’ambiance douce-amère de ce roman ! J’ai trouvé Jocelyne très humaine, pleine de qualités et de défauts, de doutes, de blessures et de joies mêlées. Certains lui reprocheront de ne pas se décider, de ne pas avancer. En même temps, elle n’en a guère le temps : le roman est court et rapidement tout va basculer.

Un joli roman que j'ai trouvé sensible mais sans sensiblerie.

La liste de mes envies, de Grégoire Delacourt
JC Lattès
Février 2012

Commentaires

Alex Mot-à-Mots a dit…
Des avis vraiment très partagés sur ce roman.
La chèvre grise a dit…
@ Alex Mot-à-Mots : effectivement. C'est ce qui a fait que j'ai préféré attendre pour le lire. Apparemment, je l'ai ressorti pile au moment où une adaptation ciné va sortir. Je n'irai pas voir le film car je ne pense pas que le récit puisse se prêter tant que ça à une bonne mise en image. Je crains le film médiocre...
Enigma a dit…
Malheureusement j'ai été déçu par ce roman, je n'y ai pas trouvé grand intérêt...
La chèvre grise a dit…
@ Enigma : je peux comprendre. De mon côté, je n'en attendais rien et j'ai été heureusement surprise.
SarahCara a dit…
J'avais apprécié ce livre mais sans plus, pas forcément de quoi en faire un best-seller je trouve..:)
Nane a dit…
Comme toi auparavant, j'ai de gros a priori concernant ce roman. Tu es la deuxième personne de mon entourage qui en parle en bien, alors peut-être me laisserai-je tenter un jour. Comme tu le dis, tout sera une question de timing!
Leiloona a dit…
J'avais vraiment aimé à sa sortie ! :D
J'avais été très étonnée par le coup de théâtre, d'ailleurs. ;)
La chèvre grise a dit…
@ Sarah Cara : un bon moment de lecture, assez différent de ce qu'on peut trouver dans d'autres. Du coup, je peux comprendre son succès. Mais de là à en faire un film... o_O

@ Nane : oui, garde le en tête, tente le un jour sans trop en attendre, tu seras peut être surprise agréablement.

@ Leiloona : pas d'étonnement de ma part, car ça ne peut que mal finir (soit pour les personnages, soit le roman lui même avec une fin pour avoir une fin).

Posts les plus consultés de ce blog

La cité Abraxas

MAM Paris #10 : Le peignoir jaune de Tal-Coat

Musée du Quai Branly #4 : Amériques