Là où les rivières se séparent [Mark Spragg]

L'auteur : Né en 1952 aux États-Unis, Mark Spragg raconte son enfance dans ce récit autobiographique Là où les rivières se séparent, son premier roman (mais le 3e traduit en France).

L'histoire : "J'ai grandi au sein d'une entreprise familiale. J'ai grandi à Holm Lodge. C'est le plus vieux ranch-hôtel du Wyoming. Quand j'étais petit garçon, je savais que le ranch se trouvait à dix kilomètres de l'entrée est du parc de Yellowstone, mais je ne savais pas que je vivais dans le plus grand espace vierge de toute clôture aux États-Unis, Alaska excepté. Ça, c'est ce que je sais aujourd'hui. À l'époque, je savais seulement que j'étais libre sur cette terre."

Mon avis : L’histoire que nous raconte l'auteur est celle d'un ranch, le Crossed Sabers Ranch, dans le Wyoming, où un jeune garçon va apprendre à devenir un homme au contact des cow-boys qui travaillent sur ces terres. Il va les accompagner pour ferrer les chevaux, soigner les bêtes, chasser le cerf...

Le problème, c'est qu'il n'y a ici aucune intrigue, aucune histoire en filigrane que lecteur pourrait suivre. Le récit narre au présent des événements marquants où l'enfant semble ressentir fortement la vie qui palpite dans son jeune corps et la construction de sa future personnalité adulte. Les anecdotes sont constituées des rituels du travail quotidien dans le ranch. Ceux-ci percutent parfois la perception enfantine du jeune narrateur, générant chez lui des émotions fortes et des questionnements. La narration respecte l'ordre chronologique, sans que le lecteur puisse pour autant se rattacher à l'évolution du personnage principal. Et il y a une comparaison sous-jacente avec la vie adulte contemporaine du narrateur. Difficile alors d'adhérer totalement à cette vision de l'enfance, si pleinement heureuse et je me suis demandé si le narrateur n'idéalisait pas cette période de sa vie. Sous couvert de nostalgie, j'ai perçu dans ces souvenirs d'enfance un adulte terriblement mal dans sa peau, qui se raccroche désespérément à ce passé si différent qu'il a pu vivre. Une forme de mélancolie donc.

Par contre, le décor est magique, il n'y a pas d'autre mot. Le lecteur sent l'odeur des bêtes, perçoit le martellement des sabots sur la terre, les rivières argentées au glouglou berçant, les prairies qui changent au fil des saisons, le froid mordant, le tout entouré par le paysage grandiose entre la forêt de Shoshone et la parc de Yellowstone, près des Rocheuses. Une vraie invitation au voyage.

"C'est la terre dont je me souviens le mieux. Je ferme les yeux et je sens s'enfler en moi la chaleur du plein été. Je vois des papillons d'un noir de goudron à l’œuvre dans les prés le long de la Soshone River, l'herbe montée en graine. Je sens les boutons des fleurs blanches, des bouffées de lavande, l'odeur herbeuse de la castilleja rouge sang, la senteur entêtante des rives couvertes de sauge basse. Ma mémoire escalade les gros rochers et j'entends mes bottes racler les lichens noirs, rouille et jaune maïs, dont ils étaient couverts." (p°13)

Merci aux éditions Gallmeister et à Babelio pour cette découverte.

Là où les rivières se séparent, de Mark Spragg
Traduit par Laurent Bury
Gallmeister
Janvier 2015

Commentaires

Nane a dit…
Dans ma PAL depuis peu!
Alex Mot-à-Mots a dit…
Aucune intrigue ? Dans ce cas, je fuis.
La chèvre grise a dit…
@ Nane : oui, c'est ce qu'on m'a dit. Bonne lecture alors.

@ Alex Mot-à-Mots : il peut avoir d'autres charmes. Mais c'est ce qui m'a gênée ici.

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