Dust [Sonja Delzongle]

L'auteur : Née en 1967, Sonja Delzongle a pas mal voyagé entre la France et la Serbie, pays d'origine de sa mère. Elle a exercé des métiers très diverses et a une réelle passion pour l'Afrique.

L'histoire : 2010. Dans un terrain vague de Nairobi, un gamin à vélo s'amuse à rouler dans une grande flaque sur le sable ocre. Du sang humain, répandu en forme de croix. Sans le savoir, le garçon vient de détruire une scène de crime, la première d'une longue série.

2012, à Nairobi. Une femme albinos est décapitée à la machette en pleine rue. Le tueur a emporté la tête, un bras aussi. Elle a été massacrée, comme beaucoup de ses semblables, parce que ses organes et son corps valent une vraie fortune sur le marché des talismans.

Appelée en renfort par le chef de la police kenyane, Hanah Baxter, profileuse de renom, va s'emparer des deux enquêtes. Hanah connaît bien le Kenya, ce pays où l'envers du décor est violent, brûlant, déchiré entre ultra modernité et superstitions. Mais elle ne s'attend pas à ce qu'elle va découvrir ici. Les croix de sang et les massacres d'albinos vont l'emmener très loin dans les profondeurs du mal.

Mon avis : Intéressée par le cadre original de ce roman, c'est avec plaisir que j'ai entamé ma lecture, en compagnie de MarieJuliet d'ailleurs, avec qui j'ai échangé tout au long de notre découverte. Et notre constat est assez partagé, il me semble.

Un cadre original donc. En cela, ce roman tient toutes ces promesses. L'action se déroule au Kenya. Et ce n'est pas un Kenya de rêves ou de safari que Sonja Delzongle nous montre. Il n'est pas dépeint ici sous ses plus beaux atours et ne figurerait pas dans une brochure touristique. Pourtant, on sent un pays riche de traditions et vraiment dépaysant. L'auteur a une histoire personnelle avec l'Afrique comme je le disais plus haut, et ça se sent. Malgré les descriptions, loin d'être idylliques, le pays est un oxymore où les richesses côtoient une pauvreté extrême.  L'auteur a une passion du détail et fait un réel travail pour expliquer au lecteur les traditions et coutumes. Même quand elles sont sordides comme cette croyance que les organes et membres d'albinos peuvent servir dans la composition de talismans. Difficilement concevables pour les européens, c'est un vrai choc de culture et un monde fascinant qui se dévoile, où la vie et la mort sont étroitement mêlées, une terre sauvage et envoûtante.

Je suis plus dubitative sur les personnages que j'ai trouvé très caricaturaux. La profileuse qui a subi un drame dans son enfance, sniffe de la coke pour tenir, est lesbienne et a des rapports difficiles avec le mec macho et arrogant... En plus, elle ne semble guère avoir à faire d'efforts pour trouver les bons indices : par exemple, quand elle cherche à rencontrer un mganga, c'est comme par hasard vers celui impliqué qu'elle est dirigée. Et c'est un peu comme ça pour toutes les interactions entre les différents protagonistes. Autre exemple : on nous dit qu'une solide amitié lie Ti Collins, directeur de la Criminelle, et Hanah Baxter, mais on ne la distingue absolument pas dans leurs relations. Du coup, les personnages manquent de profondeur. On passe de l'un à l'autre au gré des besoins, sans particulièrement s'attacher à l'un d'entre eux. Par contre, ils ne sont pas toujours utilisés comme on l'imagine, étant assez rapidement mis à mal et les rebondissements qu'ils rencontrent sont très habiles.

L'intrigue, elle, est vraiment prenante. Je passe sur l'apparition des nazis à un moment, point Godwin qui n'était pas nécessaire à mon sens. L'enquête progresse vite puisque les personnages ont rapidement les éléments. Mais faut-il encore tout démêler. Et c'est là que la fascination morbide fait son œuvre. Devant les yeux du lecteur, l'ampleur du drame qui se joue est effroyable. Le pire est que le récit est inspiré de faits réels, la traque des albinos étant courante dans certains pays d'Afrique. Les pages défilent et m'ont emportée jusque tard dans la nuit. Un livre donc terriblement efficace.

J'en ressors avec poussière et sueur qui me collent à la peau. Effarée par les horreurs perpétrées envers des êtres humains et intriguée par les richesses diverses et variées du Kenya.

Un grand merci aux éditions Denoël pour ce roman.

Dust, de Sonja Delzongle
Denoël
Mars 2015

Commentaires

c'era una volta a dit…
Je note les points forts comme les faibles que tu soulignes. Et si un jour ce roman vient dans mes mains, on verra ce qu'il en restera à la fin.
Merci!
Alex Mot-à-Mots a dit…
Un roman qui a l'air terriblement efficace.
Mariejuliet a dit…
Très jolie chronique.
Merci pour cette LC bien sympathique :-)
La chèvre grise a dit…
@ C'era : Voilà, un roman distrayant, il ne faut pas hésiter s'il te tombe entre les mains.

@ Alex Mot-à-Mots : il l'est, malgré les défauts.

@ MJ : merci à toi !

Posts les plus consultés de ce blog

La cité Abraxas

Thérapie [Sebastian Fitzek]

Musée du Quai Branly #4 : Amériques