Le facteur émotif [Denis Thériault]

L'auteur : Né en août 1959, Denis Thériault est un auteur québecois. Diplômé en psychologie, il est acteur, scénariste et écrivain. Le facteur émotif a remporté le Prix littéraire Canada-Japon en 2006.

L'histoire : Bilodo a vingt-sept ans, il est facteur et mène une existence tranquille. À l'ère des mails et des téléphones portables, il n'a plus souvent l'occasion d'acheminer une lettre personnelle. Alors, quand il en trouve une dans le flot de courriers administratifs et de publicités, il lui fait faire un petit détour et, le soir venu, ouvre l'enveloppe à la vapeur pour en découvrir le contenu. Sagement, le lendemain, il la remet à son destinataire.
Son petit vice va le conduire à faire la rencontre épistolaire de Ségolène, qui écrit régulièrement de beaux haïkus à un certain Gaston Grandpré. Tandis que son amour pour la belle grandit à l'abri du réel, un étrange coup du sort va lui offrir l'opportunité providentielle. Mais le destin ne favorise que les audacieux. Bilodo va devoir devenir poète et abandonner tout espoir de tranquillité, en laissant entrer dans sa vie l'intrigue et le sentiment.

Mon avis : Bilodo est un solitaire, sans que ça lui pèse pour autant. Il trouve la sérénité dans son métier de facteur, apportant le courrier aux gens, avec une attention toute particulière pour les courriers manuscrits qui se font de plus en plus rares. Il va même jusqu’à ouvrir ces enveloppes le soir pour lire les messages, avant de les refermer et de les apporter à leurs destinataires premiers. Une façon de vivre une autre vie par procuration.

Bon, déjà cette habitude est un peu bizarre. Mais c’est assez classique dans les romans qui exaltent le quotidien que de partir d’une situation un peu à la marge. Donc, ok, j’accepte. Le problème, c’est que Bilobo va s’enfoncer dans un comportement de plus en plus malsain : il usurpe l’identité d’un homme décédé, il va jusqu’à se glisser dans ses murs et dans ses habits pour absorber sa personnalité. Du coup, j’ai complètement lâché l’empathie première que je pouvais ressentir pour lui, lui souhaitant de trouver un moteur supplémentaire dans sa vie. Et j’ai fini par éprouver surtout de la défiance, ce qui a gâché totalement la suite de ma lecture.

Il y a pourtant une plume poétique et simple qui est vraiment plaisante. L’auteur sait jouer l’audace dans la forme pour tisser son récit, celui d’un personnage québécois échangeant des haïkus avec une guadeloupéenne. C’est assez original. Le lecteur plonge dans la beauté de ces courts poèmes japonais qui saisissent en à peine quelques mots la magie d’un instant éphémère.

Et pour clore le récit, comme si l’auteur ne savait plus comment se débarrasser de tout ça, un retournement farfelu qui a au moins le bon ton de surprendre et de cueillir le lecteur là où il ne s’y attend pas.

Le facteur émotif, de Denis Thériault
Éditions Anne Carrière
Avril 2015

Commentaires

Alex Mot-à-Mots a dit…
Je ne te sens pas pleinement convaincu par cette lecture.
La chèvre grise a dit…
@ Alex Mot-à-mots : pas du tout même :)

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