Exposition : Alphonse Mucha



Voici une exposition que je ne pouvais pas manquer après ma découverte de l'artiste lors de mon séjour à Prague cette année. Eh oui, je ne connaissais pas le nom de Mucha avant, même si bien sûr ses œuvres, en tout cas de jeunesse, m'étaient familière.

Autoportrait de Mucha
Mucha né en juillet 1860 à Ivančice en Moravie, en pleine renaissance nationale tchèque. Très tôt, il s'engage politiquement en illustrant des journaux satiriques. Il se forme à Munich dans les années 1880 et arrive à Paris en 1887, capitale alors pleine d'artistes qui se regroupent par communautés. Lorsque le comte Eduard Khuen-Belasi cesse de le soutenir financièrement, il est contraint de travailler et va illustrer ouvrages et revues. Il rencontre notamment Paul Gauguin. Certains de ses travaux le lient à la célèbre Sarah Bernhardt, à qui il devra son succès à partir de 1895. En effet, on est en plein japonisme : ses compositions hiératiques, ses couleurs pastels, ses motifs floraux sont très novateurs par rapport aux codes habituels des affiches.

Affiche de Lorenzaccio avec Sarah Bernhardt, réalisée par Mucha

En 1896, l'artiste signe un contrat d'exclusivité avec l'imprimeur parisien Champenois qui lui assure une rémunération mensuelle. Il va produire des affiches publicitaires donc, mais aussi des panneaux décoratifs, c'est-à-dire des affiches sans textes conçues uniquement à des fins décoratives. Mucha apprécie ce format qu'il trouve accessible à tous. Le "style Mucha" et l'Art nouveau deviennent synonyme.

Affiche pour Moët & Chandon, dry Impérial


Affiche pour les biscuits Lefèvre-Utile

Boite à biscuits Lefèvre-Utile, gaufrettes vanille - vers 1900

L'automne, série des Quatre saisons

Dans sa série Les Arts, Mucha développe la "formule Q" : dans un motif circulaire, une figure assise dont les jambes sont drapées et forment la queue de la lettre. Ici, il associe chaque art à un motif végétal et un moment de la journée. La Danse voit les feuilles virevolter dans la brise matinale ; une fleur rouge est mise en évidence dans La Peinture ; une jeune femme songeuse au crépuscule pour La Poésie et des oiseaux qui chantent pour La Musique.

Les Arts : La danse, la Peinture, la Poésie et la Musique - lithographies en couleur imprimées sur satin, 1898


Mucha est un artiste cosmopolite. En dehors de son art de l'affiche, les autres techniques et genres abordés par lui sont facilement relégués au second plan. Pourtant, il passe un temps considérable à réaliser des études approfondies sans se contenter d'esquisses.

Sa renommée s'accroit dans toute l'Europe. Et lorsqu'arrive l'Exposition universelle de Paris en 1900, il est au sommet de sa gloire. Il collabore notamment en 1899 avec l'orfèvre et joaillier parisien Georges Fouquet qui, après avoir hérité de l'affaire de son père, veut renouveler le style de la maison. Il est attiré par les bijoux que Mucha fait figurer sur ses affiches et lui propose de concevoir toute une série de bijoux pour son stand de l'Exposition.

Chaîne ornementale avec pendentifs de Georges Fouquet
Il va aussi dessiner pour des programmes, la couverture du catalogue, le diplôme du Grand Prix de l'Exposition universelle... Il touche même au mobilier et à la décoration. Toujours engagé politiquement, il s'occupe du pavillon de la Bosnie-Herzégovine, alors annexée par l'empire d'Autriche-Hongrie. Mais son succès fait qu'il est nommé membre de l'ordre de François-Joseph 1er, le mettant dans une position inconfortable qui lui inspirera pourtant LE projet de sa vie : celle d'une épopée qui dépeindrait les joies et peines des peuples slaves, soulignant leur lutte commune face à l'oppression.


En 1894, Mucha fait une rencontre qui va faire renaître en lui l'idée que des forces mystérieuses peuvent diriger le destin de chacun. Cela le conduit jusqu'au Grand Orient de France en 1898. Cet ordre ancien maçonnique, prône "l'amélioration de l'humanité" et la "conscience de la liberté" autour de trois vertus : beauté, vérité et amour. Avec son art, Mucha pense contribuer. Il illustrera le Pater, paroles du Notre Père illustrées et commentées, publié en 1899.

Nuit sainte, pastel sur papier, vers 1900


La rencontre à Krizky, pastel sur papier, vers 1916 - étude pour L'Épopée Slave


En 1910, Alphonse Mucha retrouve sa terre natale et met son art au service de son pays. Il réalise des affiche pour le festival de Sokol, mouvement sportif nationaliste tchèque qui se tenait tous les quatre ans.
 
Affiche du 8e festival de Sokol (spectacle historique sur la Vltava) de 1926 - synthèse du monde réel au premier plan (les deux athlètes derrière le drapeau de la Bohême) et le monde spirituel en arrière-plan (jeune femme incarnant l'unité slave)

Le patriotisme de Mucha s'incarne donc sous la forme d'un projet grandiose appelé L'Épopée slave : vingt grands épisodes, dix tirés de l'histoire tchèque et dix autres du passé d'autres nations slaves, qui forment vingt tableaux, dont certains mesurant plus de 6 mètres sur 8 ! Bien sûr, ceux-ci n'étaient pas visibles à cette exposition (il faut aller à Prague pour les voir), mais étaient proposés nombres d'études et de travaux préparatoires. L'artiste offrira ces toiles à la ville de Prague à l'occasion du dixième anniversaire de l'indépendance du pays.


Femme regardant une bougie allumée, huile sur toile, 1933

Dessins finaux du vitrail de la cathédrale Saint Guy à Prague : en haut saints Cyrille et Méthode ; au milieu sainte Ludmila ; en bas, saint Venceslas agenouillé près de sainte Ludmila - 1931

Vitrail de Mucha dans la cathédrale Saint Guy de Prague (regardez le panneau central)

Mucha meurt à Prague en juillet 1939, après avoir été arrêté par la Gestapo puisque les troupes allemandes sont entrées dans la ville en mars, mettant fin à l'indépendance de sa patrie au bout de vingt ans.


Informations utiles :

Du 12 septembre 2018 au 27 janvier 2019
Ouvert du lundi au jeudi et les samedis de 10h30 à 19h, et les vendredis de 10h30 à 22h

Musée du Luxembourg
19 rue de Vaugirard
75006 Paris
Tel : 01.40.13.62.00

Tarif normal: 13€
Tarif réduit : 9
Audioguide : 5€

Site du musée du Luxembourg ici

Commentaires

Alex Mot-à-Mots a dit…
En lisant le titre de ton article, je me suis dit que je ne connaissais pas cet artiste. Mais si, en fait.
nathalie a dit…
Je vais essayer d'y aller avant Noël, je ne connais que quelques images, mais pas l'ensemble de sa production, et ça a l'air très intéressant.
La chèvre grise a dit…
@ Alex Mot-à-mots : quand j'ai découvert l'artiste cet été à Prague, je me suis dit pareil "je ne connais pas", mais en voyant ses fameuses affiches, si en fait. Je crois qu'on ne peut pas passer à côté.

@ Nathalie : c'est l'avantage de l'exposition que tu pointes : se faire plaisir avec les oeuvres connues, et aller plus loin en découvrant le reste de son oeuvre et sa personnalité.

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