La couleur des sentiments [Kathryn Stockett]

L'auteur : Kathryn Stockett est une auteur américaine, qui a passé son enfance à Jackson, Mississipi. La couleur des sentiments (The Help en VO) est son premier roman.

L’histoire : Jackson, Mississippi, 1962.
Lorsqu’elle rentre chez elle, Aibileen, seule dans sa bicoque du quartier noir de Jackson, dîne modestement, écrit ses prières dans un carnet, pense à son fils disparu et écoute du gospel, du blues ou le sermon du Pasteur à la radio. Nurse et bonne au service de familles blanches depuis quarante ans, Aibileen n’est pas du genre à s’apitoyer sur son sort. Elle vit pour “ses enfants” – les petits Blancs dont elle s’occupe jusqu’à l’âge où ils changent –, les aime tendrement et met un point d’honneur à leur transmettre l’estime de soi, luttant comme elle le peut contre les idées racistes que leurs parents leur enfonceront bientôt dans le crâne. Aibileen est une âme généreuse, dotée d’une grande sagesse et d’une bonhomie attendrissante. Elle a la vitalité, la douceur et la rondeur d’Ella Fitzgerald.
Dans les pires moments, elle peut compter sur sa meilleure amie, Minny, bonne et cuisinière chez les Blancs depuis son plus jeune âge elle aussi, une forte tête qui ne se laisse pas marcher sur les pieds. Entre un mari alcoolique à la main lourde et cinq enfants à éduquer, son quotidien s’apparente à une lutte de survie. Ainsi dissimule-t-elle sa sensibilité sous les traits d’une maîtresse-femme à la langue bien pendue, ce qui lui a valu d’être maintes fois renvoyée. D’ailleurs, sa nouvelle patronne, pin-up désœuvrée au comportement étrange, lui donne déjà du fil à retordre.
C’est alors qu’arrive Skeeter Phelan. Vingt-deux ans et fraîchement diplômée, elle est de retour à Jackson où elle retrouve ses anciennes amies. Contrairement à elles, Skeeter n’a pas encore la bague au doigt, attache peu d’importance à ses tenues et sa coiffure, possède un esprit plus ouvert que la moyenne et souhaite plus que tout devenir écrivain. Lorsqu’on lui confie la rubrique ménagère du journal local, elle demande à Aibileen de lui donner des tuyaux. Elle apprend à la connaître et comprend bientôt qu’elle tient son sujet : il y a peu, une certaine Rosa Parks a refusé de céder sa place à un Blanc dans un bus ; un certain Martin Luther King se rend de ville en ville pour défendre la cause des droits civiques ; elle, Skeeter Phelan, va donner la parole aux bonnes de Jackson, leur demander de raconter ce que c’est qu’être une bonne noire au service d’une famille blanche du Mississippi, recueillir leurs témoignages et en faire un livre. Elle y tient d’autant plus que Constantine, la bonne qui l’a élevée et qu’elle aime profondément, a été congédiée par ses parents pour des raisons obscures.
Ce projet fou auquel se rallient Aibileen et Minny va les mettre en danger et changer à jamais le cours de leur vie.

Mon avis : Voici un livre passionnant : on se laisse porter par l’ambiance, on s’attache aux personnages et on a du mal à reposer le livre histoire de dormir un peu avant la journée de boulot du lendemain. Une fois commencée votre lecture, vous ne pouvez vous arrêter. Et c’est en ça que ce roman est un bon roman.
Alternant les points de vue d’Aibileen, de Minny et de Skeeter, respectivement deux bonnes noires et une jeune femme blanche en mal de fiancé, Kathryn Stockett traite un sujet complexe de manière juste et délicate, tout en petites touches.
Au début des années 1960 à Jackson, Mississipi, ces trois demoiselles entreprennent d’écrire un livre de témoignages sur la condition de domestique noire au service de blancs. Loin d’être une caricature, Minny et Aibileen sont des personnages touchants par les défauts qui leurs sont inhérents, par la tendresse envers ces enfants blancs qui pointent au détour de chaque phrase, par la peur qui fait partie du quotidien, par le mépris qu’elles doivent subir chaque jour. Aibileen a pris le parti de quitter une famille dès que les enfants sont trop grands, pour ne pas voir la haine et la méfiance s’installer dans leur cœur, là où il n’y avait que tendresse pour elle. Minny, elle, ne peut s’empêcher de dire les quatre vérités à ses patronnes, et perd ainsi régulièrement sa place, ayant toujours plus de difficultés à en trouver une nouvelle.
Skeeter ouvre les yeux sur ce monde qu’elle ne soupçonnait pas avant de voir disparaître sa bonne, Constantine, qu’elle aimait tant. Petit à petit, elle prend conscience des aberrations, de l’incompréhension totale des blancs, allant jusqu’à provoquer une souffrance intense chez ces noirs auxquels ils sont pourtant attachés d’une certaine manière, mais incapables de tendresse envers eux. Le quotidien de ces femmes blanches est assez triste, cerné d’interdits moraux qui les poussent vers l’ennui. Une menace permanente pèse sur la communauté noire. Skeeter, en s’impliquant dans ce monde, ressent cette menace elle aussi. Elle comprend que les noirs se réfugient aussi dans cette peur, parce qu’ils connaissent les règles qui régissent ce monde et n’osent pas affronter la colère et les répressions qui ne manqueraient pas de tomber. Le KKK n’est pas loin ! Elle n’ose d’ailleurs pas affronter ouvertement les siens avec ses idées si nouvelles à l’époque. Pourtant, elle persévère et continue à tresser des liens forts avec Aibileen surtout, plus ouverte, mais également avec Minny, plus ronchonne et au caractère de cochon mais tellement pleine de vie. Parce qu’elle ne se pose pas en héroïne qui transgresse tous les interdits je l’ai trouvé terriblement juste.

Des défauts, ce livre en a surement. Mais je vous avoue que, emportée par ma lecture, je ne les ai pas vus. J’aime ces livres qui sortent du lot et dégagent une vraie ambiance. Un vrai coup de cœur pour moi !

P.S : Je viens de voir sur Wikipedia que le roman a été adapté au cinéma dans un film éponyme sorti mi août aux États-Unis.

Commentaires

En effet le film sort en France en octobre !
choupynette a dit…
j'espère vraiment que le film sera à la hauteur de ce superbe roman! je l'ai dévoré, un vrai régal!
Leiloona a dit…
Oui, le film sort bientôt, j'ai hâte ! :)
pom' a dit…
j'attends avec impatience que le biblio l'ai
Anonyme a dit…
J'en prends note ! Je l'avais en main lors de ma dernière visite à la librairie... A la prochaine, je ne le reposerai pas, maintenant que j'ai lu ta critique !
Fleurdusoleil a dit…
Pour moi aussi ce fut un coup de coeur. Ces femmes sont tellement touchantes.
C'est un livre que l'on oublie pas facilement !
Manu a dit…
J'ai aussi beaucoup aimé ce roman ! Un délice.
Alex Mot-à-Mots a dit…
J'ai bien aimé ce roman. Comme toi, je me suis laissée embarquée par les personnages, et tant pis pour les défauts.
Plum(isa) a dit…
J'ai également adoré !
Mais je ne suis pas sûre d'aller voir le film "The help", j'ai tellement été déçue avec des adaptations de romans aimés...et en même temps, je suis curieuse de voir comment c'est joué et les interprètes. Ah dilemme ;-) !!
La chèvre grise a dit…
@ George : octobre ? ouh mais c'est bientôt ! chouette alors !

@ choupynette : difficile de ne pas être exigeante quand la lecture est aussi récente et aussi forte.

@ Leiloona : moi aussi du coup !

@pom' : ça vaut le coup.

@ Aelys : eh oui, j'ai hésité moi aussi mais finalement, je ne regrette pas.

@ Fleurdusoleil : oui, il trotte dans la tête un bout de temps.

@ Manu : j'aime beaucoup ces romans qui sortent de l'air du temps.

@ Alex Mot-à-Mots : les défauts, je ne les ai pas vu, alors oui, tant pis :-)

@ Plum(isa) : ça sera dur de résister pour moi. Mais ce ne sera peut être pas la priorité. J'ai envie de voir d'autres films qui sortent ce mois-ci comme par exemple "The artist".

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