Detachment, de Tony Kaye

Film américain de Tony Kaye, sorti le 01 février 2012, avec Adrien Brody.

L’histoire : Henry Barthes est un professeur remplaçant. Il est assigné pendant trois semaines dans un lycée difficile de la banlieue new-yorkaise. Lui qui s’efforce de toujours prendre ses distances va voir sa vie bouleversée par son passage dans cet établissement...

Mon avis : La mise en scène est originale, comme instable : on oscille entre cette jeunesse américaine qui va droit dans le mur et le mal être profond d’Henry Barnes, jeune homme qui voit son grand-père mourir et qui soupçonne celui-ci d’avoir eu des gestes déplacés envers sa mère, la poussant peut être au suicide. Le tout est parsemé de flash-back en super 8 et d’images animées dessinées sur un tableau à la craie, apportant une certaine poésie.
Le système éducatif est au bord du gouffre. Si il est question beaucoup du mal être voire du désespoir de ces enseignants pourtant terriblement attachés à ceux-là même qui les malmènent ; s’il est beaucoup question également de ce « no future » que ressentent les adolescents, surtout face à cette société où tout est prédigéré ; où sont les parents ? Ce sont les grands absents qui crèvent pourtant l’écran. Alors certes, on a droit à la mère hystérique qui refuse le renvoi de sa fille car elle ne peut pas la garder à la maison (l’école n’est pas une garderie pourtant). On a aussi droit au père qui ne sait pas gérer le comportement déviant et terriblement violent de son fils, et qui confond école et établissement psychiatrique. Mais lors de la réunion parents-profs, bizarrement, les couloirs sont totalement déserts !
Adrien Brody est juste : on sent que le sujet lui tient à cœur, lui dont le père était professeur d’histoire à New York. Il joue ce rôle de professeur détaché dans les deux sens du terme : détaché car il réalise des remplacements, ne prenant une classe que pour un court laps de temps avant le retour du titulaire ; détaché également car il est comme un observateur à distance de cette souffrance qui prend plusieurs formes. Celle des adolescents, au final assez classique. Celle des profs, plus rarement mise en évidence : le spectateur est témoin de leur air perdu, qui ne sait plus par quel bout prendre le problème tellement le bateau prend l’eau de tous les côtés. Enfin, celle de l’être humain qui doit gérer sa propre souffrance de vivre, seul. Pour certains ce sera la peur de la solitude, pour d’autre ce sera l’indifférence de sa famille. Pour Henry enfin, c’est ce grand-père, comme une énigme. Il se raccroche alors à l’espoir de sauver une jeune fille, à défaut de pouvoir se sauver directement lui-même.
Bizarrement, malgré ce ton désabusé, le film n’est pas dénué d’optimisme. Je me suis longuement demandé pourquoi. Peut être parce que, malgré la noirceur du tableau, des enseignants ne baissent pas les bras, et tentent encore et toujours de sauver ceux qui peuvent l’être.
Il y a tout de même quelques maladresses comme cette histoire de jeune prostituée sauvée et avec laquelle il retrouve un semblant de famille, l’évidente classe plus sympa que celle du prof d’Histoire et avec qui il est bien sûr plus facile d’instaurer le dialogue (la scène où l’élève le défie et lui finit par lui donner feuille et stylo ne se serait jamais terminée ainsi dans la vie réelle – on se croirait dans Dangerous Minds), les interventions face caméra ou encore les flash-back certes poétiques mais un peu racoleurs.
Pour le reste, c’est un film qui parle d’un sujet qui me touche personnellement. Mas pas sur que tout le monde y trouve son compte.

Commentaires

Cachou a dit…
Tout le monde n'y trouve pas son compte effectivement, ce film a été démoli par la critique officielle et la critique officieuse des blogs en a presque fait autant.
Je trouve ça dommage, j'ai également aimé ce film, m'y suis aussi beaucoup retrouvée, et je trouve qu'il met en exergue une situation scolaire qui est, pour une fois, le reflet de ce qui se passe vraiment dans les écoles, et pas les écoles à problèmes, mais les écoles dites "normales".
Céline a dit…
J'ai aussi beaucoup aimé ce film, et je trouve Brody d'une justesse incroyable.

Posts les plus consultés de ce blog

La cité Abraxas

Musée du Quai Branly #4 : Amériques

Thérapie [Sebastian Fitzek]