Couleurs de l'incendie [Pierre Lemaître]

J’avais adoré Au-revoir là-haut. L’engouement suscité par la sortie de cette suite, qui peut tout à fait se lire de façon indépendante, pour grande partie du au succès de ce premier tome, m’a freinée dans mon envie de découvrir ces Couleurs de l’incendie. Et c’est un peu contrainte par l’envie de rendre ce livre à son légitime propriétaire que je l’ai commencé, avant de plonger complètement et de dévorer à nouveau ces plus de 500 pages en un temps record.

L'histoire : Février 1927. Le Tout-Paris assiste aux obsèques de Marcel Péricourt. Sa fille, Madeleine, doit prendre la tête de l'empire financier dont elle est l'héritière, mais le destin en décide autrement. Son fils, Paul, d'un geste inattendu et tragique, va placer Madeleine sur le chemin de la ruine et du déclassement.

Face à l'adversité des hommes, à la cupidité de son époque, à la corruption de son milieu et à l'ambition de son entourage, Madeleine devra déployer des trésors d'intelligence, d'énergie mais aussi de machiavélisme pour survivre et reconstruire sa vie. Tâche d'autant plus difficile dans une France qui observe, impuissante, les premières couleurs de l'incendie qui va ravager l'Europe.

Mon avis : Après l’arnaque au monuments aux morts, c’est à la vengeance d’une femme que s’attaque Pierre Lemaître. Celle d’une femme qui a tout perdu, son argent comme sa position sociale privilégiée, et qui va se servir des ambitions politiques des uns, économiques des autres pour remonter la pente. La crise de 1929 est presque là, les fascismes montent en Europe et fascinent les intellectuels, le nazisme s’installe en Allemagne alors qu’en France on peine à panser les plaies de la grande boucherie que fut la guerre de 14-18.

On retrouve la famille Péricourt sept ans après le suicide d’Edouard, pour assister aux obsèques de son père. La cérémonie va virer au drame. Et Madeleine va se retrouver toute seule avec un enfant handicapé, prise au piège de la finance, de la politique et de la presse. Chaque personnage de ce roman est parfaitement ciselé, tous en noir et gris, car Pierre Lemaître ne joue pas sur la corde sensible facile, sur une sympathie évidente, en faisant de son personnage principal une pauvre victime innocente. L’intrigue prend son temps à se mettre en place mais c’est pour mieux vous attraper dans ses filets et pour parfaitement camper le décor historique. Avec talent, l’auteur prend la matière historique pour la travailler, s’écartant parfois de la véracité, mais toujours en pensant à l’équilibre de son récit. Ca donne encore une fois un roman qui se dévore. Et comme apparemment il s’agit du deuxième tome d’une trilogie, on attend maintenant la suite avec impatience !

"Des manifestations s'organisèrent. Dans la seconde quinzaine d'août, la France en compta pas moins de quarante-quatre, auxquelles se mêlaient ici ligues de jeunesse patriotique et anciens combattants, là, syndicats et corporations, ailleurs, des antirépublicains militants, partout des mécontents, des révoltés qui s'estimaient spoliés, dépossédés, volés. Le grand coupable, c'était l'impôt. Le grand ennemi, c'était l'Etat." (p°379)

Couleurs de l'incendie, de Pierre Lemaître
Éditions Albin Michel
Janvier 2018

Commentaires

Alex Mot-à-Mots a dit…
Un troisième tome qui se fait attendre...
La chèvre grise a dit…
@ Alex mot-à-mots : plusieurs années se sont écoulées entre les deux premiers donc il va surement falloir patienter :)

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