Le cartographe des Indes boréales [Olivier Truc]

L'auteur : Né en novembre 1964, Olivier Truc est un journaliste et écrivain français, installé à Stokholm depuis 1994.

L'histoire : Stockholm, 1628. Alors que la magnifique Vasa s'enfonce dans les eaux sombres du Mälaren, Izko est témoin d'une scène étrange : un homme est tué, une femme en fuite met au monde un enfant. Elle fait un geste. Malédiction ou prémonition ?
Comme tous les jeunes Basques, Izko rêvait de chasse à la baleine dans les eaux glacées des confins du monde sur les pas de son père, un harponneur de légende. Mais une force mystérieuse a changé le cours de son destin, le vouant au service de Fieu et du roi : il sera espion de Richelieu.
Après avoir étudié la cartographie à Lisbonne et Stockholm, Izko part explorer les Indes boréales, où les Suédois espèrent trouver des mines d'argent pour financer leurs guerres tandis que des prêtres fanatiques convertissent les Lapons par la force. 
Tenu par un terrible chantage, Izko devra frôler mille morts, endurer cent cachots pour conjurer le sort et trouver sa liberté, aux côtés des Lapons fiers et rebelles et d'une femme qui l'a toujours aimé.

Mon avis : Le nom d’Olivier Truc est associé à des romans policiers se déroulant dans le Grand Nord. On sait qu’il aime traiter des communautés spoliées qui y sont présentes, notamment les Samis. Ici, c’est toujours le cas même il opte pour un roman tirant davantage sur l’aventure historique.

Izko Detcheverry est un jeune garçon né aux Pays Basques, destiné à la chasse à la baleine avec son père. Son apprentissage le mène donc en Suède, où il assiste au naufrage du Vasa (j’ai eu l’occasion il y a 10 ans de visiter le musée qui lui est consacré à Stockholm et qui m’avait beaucoup impressionnée). Suite à cet événement, un homme de main de Richelieu va changer son destin : il sera espion et pour se faire dessinera des cartes géographiques. Le harpon est donc rangé au profit de l’observation, dans les moindres détails, des lieux. La Suède veut conquérir de nouveaux territoires, imposer sa domination politique sur les terres du Nord, qui s’avèrent riches en minerai. Or ces richesses appartiennent aux pays qui saura les revendiquer. Izko est envoyé pour dresser une carte avantageuse de la région. Et au passage, la Suède en profitera pour évangéliser un peu ces sauvages autochtones.

Nous suivons donc Izko pendant tout le XVIIe siècle, entre la France, la Suède et les Pays-Bas, aux prises avec les tactiques politiciennes des différents dirigeants, sous influences catholiques, luthériennes ou calvinistes selon les périodes. Difficile pour le jeune homme de prendre son destin en main dans de telles conditions. Il vogue comme il le peut sur des flots houleux et très versatiles.

Pour une fois, la couverture du roman est parfaitement réussie. Elle évoque, sans trop en dire, les différents aspects du roman : de l’aventure donc, mais aussi de l’Histoire et de la géographie. Il y a bien tout ça, un mélange de confins, de danger, de manœuvres politiques aussi. J’émets un bémol sur l’aspect aventure, qui m’a semblé parfois poussif (notamment sur la romance), long à se mettre en place, plein d’ellipses, ce qui finit par déstabiliser quelque peu : on se demande où veut en venir l’auteur et quel est l’arc narratif qu’il cherche à mettre en place. Il faut attendre plus de la moitié de ce pavé pour commencer à deviner ce qui l’intéresse. À l’inverse, ce qui est passionnant dans ce roman, en plus de l’aspect historique qui est toujours très intéressant, c’est la voix donnée aux Samis (Lapons dans le livre, pour des raisons historiques), ou comment l’Homme « civilisé » les a méticuleusement spoliés de leurs terres, a détruit leur civilisation et réduit à néant leur moyen de subsistance. Leur survie ne tenant alors qu’à l’assimilation forcée.

Un roman parfois un peu laborieux mais vraiment passionnant sur l’aspect historique.

"Le bateau commençait à tanguer. Un vent soudain venait enfin de s'engouffrer dans les voiles. Le bateau allait pouvoir s'épanouir. Izko approcha encore du bord, suivant le Vasa qui s'éloignait sur sa droite. Il serra les poings en apercevant le navire pencher sur son tribord. Izko n'avait rien d'un marin avisé, mais ce ne pouvait être normal. Le Vasa se redressa, pour basculer de l'autre côté, sur bâbord, avec plus d'amplitude encore. Le léger vent qui lui soufflait au visage était maintenant d'une tout autre force au pied de la falaise. Izko entendit des cris en provenance du navire. Le Vasa ne se redressait plus." (p°22)


Le cartographe des Indes boréales, d'Olivier Truc
Éditions Métailié
Mars 2019

Commentaires

keisha a dit…
Je ne peux qu'être d'accord. Parfois j'étais perdue. J'aurais aimé plus de géographie et de cartographie
Alex Mot-à-Mots a dit…
Son premier roman m'avait plu, mais sans plus. Je ne suis pas sûre que cet ouvrage me plairait d'avantage.
La chèvre grise a dit…
@ Keisha : je trouve que la carte en début d'ouvrage aide bien à se situer. Mais c'est vrai que beaucoup, surtout pour la cartographie, passe par l'imaginaire. Et j'aurais adoré avoir une représentation des cartographies produites à cette époque.

@ Alex Mot-à-mots : n'ayant pas lu ses premiers romans, difficile pour moi de te dire, mais il semble que cette fois, il ait changé de registre.
Brize a dit…
Je craignais justement qu'il y ait cet aspect un peu "poussif" ou "laborieux" que tu pointes, raison pour laquelle je n'ai pas retenu ce pavé pour mes lectures estivales.

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