La vie, au fond [Hugues Serraf]

L'auteur : Hugues Serraf est un journaliste et écrivain naviguant entre Marseille  et Paris. La vie, au fond est son dernier roman.

L'histoire : Rico c'est l'Alain Delon marseillais, les dents en moins, la bedaine en plus. Quand il n'est pas occupé à refourguer son mauvais shit ou à vendre des blousons en cuir à la sauvette, il se dispute avec son père et philosophe avec le rat qui a élu domicile dans son appartement amianté. Auditeur assidu de France Culture, cet éternel séducteur au catogan défraîchi se dit qu'il est peut-être passé à côté du grand amour. À l'heure des sites de rencontre 3.0, il refuse d'ailleurs obstinément de troquer son Alcatel hors d'âge pour un smartphone dernier cri.

Fournisseurs, créanciers et autres conseillers Pôle Emploi aux trousses, notre Hell's Angel va devoir fuir les Puces des Arnavaux pour un Paris qui n'est plus celui de sa jeunesse, mais où vit toujours la femme qu'il n'a jamais pu oublier.

Mon avis : Ce roman c'est celui des tribulations d'un loser sympathique, Rico. Personnage improbable, vivant de petits deals minables, sur le point de se faire expulser de son appartement dans un immeuble en cours de gentrification, en procès avec tout le monde et refusant la modernité mais pourtant féru de culture puisqu'il écoute toutes les émissions de France culture, qu'elles soient politiques ou philosophiques, sur son vieux transistor. Cela lui permet de rester ancré dans la vie, d'avoir un avis sur ce qui l'entoure même s'il n'y est jamais confronté. Car sa vie à lui, c'est déjà survivre. Si avec un tel portrait, vous ne succombez pas, je ne sais pas quoi vous dire d'autre...

Enfin si, que c'est magnifiquement servi par la plume caustique de Hugues Serraf, qui manie à merveille le verbe au point qu'on entend chanter l'accent marseillais en le lisant. Les émotions sont là, à fleur de mots. Et pour autant, ça sent terriblement le vécu, l'authentique. Pas de faux semblant, de fausse pudeur mais de la tendresse entre les lignes. Rico se livre et fait preuve d'une belle débrouillardise malgré les vicissitudes qu'il traverse. Au passage, il souligne les aberrations de notre temps, où tout se calcule à coup de paraître et sous le feu d'une violence omniprésente. Si je devais noter un bémol, ce serait l'histoire d'amour qui n'apporte pas grand chose au récit à mon goût. Mais c'est là un petit défaut sans conséquence.

La vie, au fond, fait partie de ces petites pépites cachées dont on n'entend malheureusement pas assez parler !


La vie, au fond, de Hugues Serraf
Éditions Intervalles
Mai 2022

Commentaires

Alex Mot-à-Mots a dit…
Merci pour cette pépite.

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