Battle royale [Koushun Takami]

L'auteur : Koushun Takami est un écrivain japonais né en 1969. Il a été journaliste pendant 5 ans avant de se tourner vers la fiction en publiant son premier roman Battle Royale en 1999.

L'histoire : Dans un pays asiatique imaginaire existe un programme gouvernemental connu sous le nom de "Battle royale". Chaque année, une classe de 3e est choisie au hasard, emmenée sur une île coupée du monde, et les collégiens doivent combattre entre eux jusqu'au dernier survivant...
Ceci afin de servir d'exemple à la population, à la jeunesse particulièrement, et aussi de recueillir des statistiques sur le temps mis par le champion à éliminer ses camarades.

Mon avis :  Le résumé vous rappelle furieusement quelque chose n’est-ce pas ? Et pourtant Suzanne Collins a dit à de multiples reprises qu’elle ne s’était pas inspirée de ce roman japonais. Bon, les similitudes sont nombreuses, et quand on connait Hunger games, la surprise n’est plus vraiment là à la lecture, forcément. Alors, où trouver un intérêt dans la lecture de ce roman ?

D’abord parce qu’il y a des relents de 1984 : il est question de politiques intérieure et extérieures. L’armée et la police sont toutes puissantes, menant des exactions comme elle l’entendent, en fonction des purges commandées par le gouvernement. La population, encouragée à produire, augmente le PNB du pays et s’offre ainsi une vie confortable, qui annihile toute volonté de s’opposer. Les informations provenant de l’extérieur tout comme les importations de produits étrangers, musique, vêtements et autre, sont strictement contrôlés et très limités. L’antiaméricanisme est très développé. C’est dans ce contexte que le gouvernement créé le Programme 68, une expérimentation qui a lieu chaque année, dans chaque préfecture du pays : une classe de 3e est tirée au sort, menée dans une zone évacuée et les membres de la classe sont contraints de s'entre-tuer. La raison d’être du Programme est un des sujets souvent discutés par les protagonistes que nous suivons mais la principale semble être d’empêcher toute velléité de rébellion en limitant la confiance que peut avoir un japonais envers un autre.

Ce qui détonne dans ce roman et qui en fait toute la saveur, c’est le ton employé, si peu habituel dans les romans japonais : franc, direct, parfois cru, et avec quelques touches d’humour. Le récit est souvent violent, on s’en douterait vu le résumé. Les personnages oscillent entre terrifiés et terrifiants. Certains n’ont ni morale ni scrupule, racontant des agissements aberrants pour des adolescents, alors que d’autres ont des réflexions d’une naïveté stupéfiante. On retrouve en fait les mêmes schémas, transposés sur la jeunesse, que ceux qu’on trouve dans le monde du travail japonais, renforçant cette image de société à la fois ouverte mais terriblement ancrée dans les traditions et soumise à la hiérarchie. Et bien sûr, en exergue, la question essentielle : jusqu’où l’être humain est-il prêt à aller pour survivre pour peu que la société lui en laisse carte blanche ?

Une belle lecture donc que ce classique japonais, prenante, mais malheureusement guère surprenante.

"Mais pourtant, même si rien n'a de sens, nous éprouvons quand même des sentiments comme le bonheur ou la joie... C'est quelque chose de tout petit, d'infime, mais si cette petite chose parvient en partie à remplir notre vide, n'est-ce pas déjà magnifique ?" (p°710)

Battle royale, de Koushun Takami
Traduit par Patrick Honoré, Tetsuya Yano et Simon Nozay
Éditions Livre de poche
Novembre 2014

Commentaires

Bonjour
Comment se compare le roman au film avec Takeshi Kitano ?
La chèvre grise a dit…
@ Christ_OFF : n'ayant pas vu le film, je ne pourrai pas répondre. Mais je serais curieuse de le voir dans pas trop longtemps justement pour pouvoir comparer.

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