Porteurs d'âmes [Pierre Bordage]
L'auteur : Pierre Bordage, né en janvier 1955, est un auteur français de romans de science-fiction.
Avec ce roman, Porteurs d'âmes, publié en 2007, il a remporté le prix des lecteurs du Livre de Poche 2009.
L'histoire : Léonie, achetée au Liberia, alors qu'elle n'était qu'une enfant, séquestrée, prostituée, s'enfuit à vingt ans de son enfer pour se retrouver clandestine et sans papiers dans les rues de Paris.
Edmé, un inspecteur de la Crim', déprimé par les violences, la misère et le cynisme qu'il côtoie chaque jour, découvre un étrange charnier dans la Marne.
Cyrian, fils de famille en mal de raisons de vivre, se prête à un voyage expérimental d'un genre nouveau, pour trouver le frisson de l'extrême : le transfert de l'âme dans un corps d'emprunt...
Leur point commun ? Tous trois sont porteurs d'âmes, comme tous les êtres humains. Mais parfois les âmes ne sont pas où elles devraient être...
Mon avis : En visite dans sa petite mais néanmoins très riche librairie à Chennevières sur Marne, la tenancière des lieux, Madame George, en entendant que j'aimais la SF, me tend un livre de Pierre Bordage en me disant :"on m'a dit que c'était très bien même si ce n'est pas de la SF comme ce qu'il fait d'habitude. C'est un polar... Mais je ne te force pas à l'acheter hein !!!". Dis comme ça, devinez ce que j'ai fait ? Je l'ai acheté bien sûr... Alors que Petite Fleur avait déjà les bras remplis de livres et que ma CB avait déjà chauffé à blanc.
Je retrouve donc Pierre Bordage, un des rares auteurs de SF français qui me tient à cœur : sa trilogie des Guerriers du Silence et sa saga Wang m'avaient bien plu. On change un peu de registre avec ce Porteurs d'âmes puisque c'est un polar. Il y a un fond fantastique tout de même : sans rien divulguer de bien crucial, ça traite de la possibilité de quitter son corps et de voyager dans celui d'un autre, le "porteur d'âme".
À la mode américaine, Bordage entrelace plusieurs récits dont on se doute qu'ils vont se rejoindre. On suit donc une jeune africaine clandestine, esclave, prostituée depuis son enfance par une horrible femme et son compagnon. Elle arrive à s'enfuir et, dans ses tribulations, tombe sur un étrange laboratoire qui lui propose de tester des médicaments contre de l'argent.
On suit ensuite un policier cinquantenaire en bout de course, talentueux malgré tout, et qui se retrouve, poussé par son instinct, sur une affaire de meurtres en série atroces.
Enfin, on suit un jeune homme dans une grande école française qui veut rentrer dans une espèce de confrèrerie élitiste et qui doit faire des choses terribles pour y parvenir. Une fois arrivé à ses fins, on va lui proposer le frisson ultime réservé à l'intelligentsia : la possibilité de voyager dans le corps d'un autre.
L'ensemble se tient bien, même si l'intrigue est assez entendue parce qu'on devine assez vite où tout cela mène. Mais là n'est pas l'intérêt du livre à vrai dire. Celui-ci réside d'abord dans la description du quotidien de la jeune clandestine dans la banlieue parisienne, de l'horreur de l'esclavagisme sexuel, des squats, des sans-logis, de l'absurdité des foyers de clandestins. Bordage ne nous épargne pas, sans toutefois tomber dans le graveleux, et on est écœuré de voir que, même sortie des griffes de ses tortionnaires, la jeune fille ne tarde pas à retomber sur d'autres hommes pervers. L'auteur dépeint également un Paris qui n'est pas tout à fait celui d'aujourd'hui mais presque, un Paris ultra-sécuritaire où la police peut se débarrasser définitivement de clandestins, de squatteurs sans que cela fasse la une des journaux.
À un moment, comme vous l'imaginez, 2 âmes vont se retrouver dans le même corps : l'âme portée ressent ce que le porteur ressent. Elles interagissent, elles se parlent tout en dialoguant avec les personnages extérieurs. Et là est le tour de force de Pierre Bordage : il arrive à écrire des dialogues où, quand le porteur d'âme parle à une autre personne, il s'agit bien dans le texte de la discussion entre 2 personnes. Sauf que dans les phrases du porteur d'âme, en fait ce sont 2 personnes qui s'expriment. Il n'y a aucun signe (italique ou tiret) permettant de dire que c'est l'un ou l'autre qui s'exprime. Et pourtant, quand on lit la phrase, on sait exactement qui parle à tout moment. Bravo, parce que jamais on ne se dit :"mince mais qui parle ?" D'ailleurs, le récit est globalement impressionnant de fluidité et se lit d'un trait.
Ajoutons que le personnage du policier est attachant et que l'enquête à laquelle il fait face est assez glauque et prenante. Les scènes d'action sont bien maîtrisées et le lecteur entre bien dans le mode thriller. On pourrait reprocher des personnages un peu caricaturaux et une fin un peu facile à mon goût, mais comme tous ces livres qui reposent sur un concept, ils s'épuisent assez vite et doivent se terminer malgré tout.
Ce n'est pas le meilleur polar de l'univers, c'est sûr, mais rien que pour la fluidité de l'ensemble et l'exercice de style parfaitement maîtrisé de la phrase "multi-locuteurs", je ne saurais trop le conseiller. À bientôt monsieur Bordage !
Avec ce roman, Porteurs d'âmes, publié en 2007, il a remporté le prix des lecteurs du Livre de Poche 2009.
L'histoire : Léonie, achetée au Liberia, alors qu'elle n'était qu'une enfant, séquestrée, prostituée, s'enfuit à vingt ans de son enfer pour se retrouver clandestine et sans papiers dans les rues de Paris.
Edmé, un inspecteur de la Crim', déprimé par les violences, la misère et le cynisme qu'il côtoie chaque jour, découvre un étrange charnier dans la Marne.
Cyrian, fils de famille en mal de raisons de vivre, se prête à un voyage expérimental d'un genre nouveau, pour trouver le frisson de l'extrême : le transfert de l'âme dans un corps d'emprunt...
Leur point commun ? Tous trois sont porteurs d'âmes, comme tous les êtres humains. Mais parfois les âmes ne sont pas où elles devraient être...
Mon avis : En visite dans sa petite mais néanmoins très riche librairie à Chennevières sur Marne, la tenancière des lieux, Madame George, en entendant que j'aimais la SF, me tend un livre de Pierre Bordage en me disant :"on m'a dit que c'était très bien même si ce n'est pas de la SF comme ce qu'il fait d'habitude. C'est un polar... Mais je ne te force pas à l'acheter hein !!!". Dis comme ça, devinez ce que j'ai fait ? Je l'ai acheté bien sûr... Alors que Petite Fleur avait déjà les bras remplis de livres et que ma CB avait déjà chauffé à blanc.
Je retrouve donc Pierre Bordage, un des rares auteurs de SF français qui me tient à cœur : sa trilogie des Guerriers du Silence et sa saga Wang m'avaient bien plu. On change un peu de registre avec ce Porteurs d'âmes puisque c'est un polar. Il y a un fond fantastique tout de même : sans rien divulguer de bien crucial, ça traite de la possibilité de quitter son corps et de voyager dans celui d'un autre, le "porteur d'âme".
À la mode américaine, Bordage entrelace plusieurs récits dont on se doute qu'ils vont se rejoindre. On suit donc une jeune africaine clandestine, esclave, prostituée depuis son enfance par une horrible femme et son compagnon. Elle arrive à s'enfuir et, dans ses tribulations, tombe sur un étrange laboratoire qui lui propose de tester des médicaments contre de l'argent.
On suit ensuite un policier cinquantenaire en bout de course, talentueux malgré tout, et qui se retrouve, poussé par son instinct, sur une affaire de meurtres en série atroces.
Enfin, on suit un jeune homme dans une grande école française qui veut rentrer dans une espèce de confrèrerie élitiste et qui doit faire des choses terribles pour y parvenir. Une fois arrivé à ses fins, on va lui proposer le frisson ultime réservé à l'intelligentsia : la possibilité de voyager dans le corps d'un autre.
L'ensemble se tient bien, même si l'intrigue est assez entendue parce qu'on devine assez vite où tout cela mène. Mais là n'est pas l'intérêt du livre à vrai dire. Celui-ci réside d'abord dans la description du quotidien de la jeune clandestine dans la banlieue parisienne, de l'horreur de l'esclavagisme sexuel, des squats, des sans-logis, de l'absurdité des foyers de clandestins. Bordage ne nous épargne pas, sans toutefois tomber dans le graveleux, et on est écœuré de voir que, même sortie des griffes de ses tortionnaires, la jeune fille ne tarde pas à retomber sur d'autres hommes pervers. L'auteur dépeint également un Paris qui n'est pas tout à fait celui d'aujourd'hui mais presque, un Paris ultra-sécuritaire où la police peut se débarrasser définitivement de clandestins, de squatteurs sans que cela fasse la une des journaux.
À un moment, comme vous l'imaginez, 2 âmes vont se retrouver dans le même corps : l'âme portée ressent ce que le porteur ressent. Elles interagissent, elles se parlent tout en dialoguant avec les personnages extérieurs. Et là est le tour de force de Pierre Bordage : il arrive à écrire des dialogues où, quand le porteur d'âme parle à une autre personne, il s'agit bien dans le texte de la discussion entre 2 personnes. Sauf que dans les phrases du porteur d'âme, en fait ce sont 2 personnes qui s'expriment. Il n'y a aucun signe (italique ou tiret) permettant de dire que c'est l'un ou l'autre qui s'exprime. Et pourtant, quand on lit la phrase, on sait exactement qui parle à tout moment. Bravo, parce que jamais on ne se dit :"mince mais qui parle ?" D'ailleurs, le récit est globalement impressionnant de fluidité et se lit d'un trait.
Ajoutons que le personnage du policier est attachant et que l'enquête à laquelle il fait face est assez glauque et prenante. Les scènes d'action sont bien maîtrisées et le lecteur entre bien dans le mode thriller. On pourrait reprocher des personnages un peu caricaturaux et une fin un peu facile à mon goût, mais comme tous ces livres qui reposent sur un concept, ils s'épuisent assez vite et doivent se terminer malgré tout.
Ce n'est pas le meilleur polar de l'univers, c'est sûr, mais rien que pour la fluidité de l'ensemble et l'exercice de style parfaitement maîtrisé de la phrase "multi-locuteurs", je ne saurais trop le conseiller. À bientôt monsieur Bordage !
J'avais adoré !
RépondreSupprimerC'était le premier roman de l'auteur que je lisais : j'en ai essayé deux autres depuis, mais aucun n'a suscité chez moi le même engouement, dommage.
J'ai un Bordage dans ma PAL, il faudra que je m'y mette. En plus, cela fait des siècles que je n'ai pas lu de SF...
RépondreSupprimer@Brize: ce n'est pas mon auteur préféré de SF mais ses idées sont très intéressantes malgré les quelques longueurs de ses sagas. Je préfère tout de même ses récits de SF à ce polar à l'intrigue un peu entendue même si ça m'a permis de revoir que ce monsieur avait un style vraiment bon.
RépondreSupprimer@choupynette: lequel?
Je l'ai dans ma Pal depuis...presque 2 ans je crois, oups.
RépondreSupprimerje n'ai jamais lu encore cet auteur.
RépondreSupprimer@**Fleur**: c'est mal, très mal!!!!
RépondreSupprimer@Lilibook: commence plutôt par ses bouquins de SF si tu aimes le genre!