La louve boréale [Núria Tamarit]

L'autrice : J'ai découvert Núria Tamarit avec Géante, pour lequel cette autrice et illustratrice espagnole née en 1993 avait prêtée son dessin au scénariste français Jean-Christophe Deveney.

L'histoire : Il y a un endroit, de l’autre côté de l’océan, où les hommes partent et d’où ils reviennent après quelques semaines avec des sacs remplis d’or. Sur le Vieux Continent déchiré par les guerres, Joana a tout perdu. Elle vend alors ses dernières possessions et s’embarque pour ce Nouveau Monde plein de promesses, décidée à intégrer une expédition d’orpailleurs. Mais sur place, elle déchante vite : dans ces grands espaces froids et hostiles encore inexplorés, c’est la loi du plus fort qui règne et personne ne veut d’une femme dans son équipe. Qu’à cela ne tienne, elle ira seule. Bien vite, elle prend pourtant pour compagne de voyage une chienne qu’elle a libérée d’un maître cruel, avant d’être rejointe également par Opa et Tala, deux femmes Natives fuyant Matwei, un chercheur d’or prêt à toutes les violences pour assouvir sa cupidité.

Elles s’engagent alors ensemble dans une course contre la montre : il faut rentrer avant que l’hiver n’ait recouvert de son manteau mortel ce territoire des loups tout en évitant les hommes qui haïssent les femmes.

Mon avis : Ce qui fait l'intérêt de cet album, c'est indubitablement dans un premier temps le dessin de Núria Tamarit, très reconnaissable, tant par la rondeur de ses personnages que par les couleurs utilisées et l'univers puissant et pourtant onirique qui se dégage. Un dessin dans le style de la ligne claire mais que l'autrice a su habilement moderniser. 



À la lecture, du fait de ce dessin, on a une étrange sensation de douceur alors que le propos est lui assez brutal : suite à un événement qui nous sera révélé petit à petit, Joana décide d'aller chasser de l'or dans le Nouveau Monde. Avec ce pécule, elle espère pouvoir reconstruire sa vie. Mais aucune expédition ne souhaite s'encombrer d'une femme. Car il faut être fort face à la rudesse de la Nature pour survivre, trouver puis exploiter un filon. Elle finit par se lancer seule, croisant sur son chemin des orpailleurs peu scrupuleux voire violents.

Si la Nature est sauvage et brutale, on se rend vite compte à la lecture qu'elle ne l'est pas davantage que les hommes qui la maltraite à seule fin d'enrichissement personnel. Ils prennent et ne donnent jamais, alors la Nature se charge de reprendre elle-même son dû. Le récit de Joana érige les femmes en justicières en ce qu'elles vont devoir lutter contre les hommes certes, mais surtout progressivement de contre la Nature à avec elle, dans un éternel souci d'équilibre : ne pas prendre plus que ce dont on a besoin. 

Un récit féministe qui se lit bien servi par un univers graphique remarquable donc, mais j'aurais aimé une construction peut être plus fine de la psychologie des personnages, moins manichéenne pour être vraiment convaincue. À l'inverse, en ces périodes de questionnement climatique, le propos est très moderne et fait forcément écho à notre vécu.


La louve boréale, de Núria Tamarit
Éditions Sarbacane
Mai 2022

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